Cher·es membres, ami·es, soutiens,
Bonne nouvelle !
Il y a quelques semaines, nous avons appris que le projet de
déviation d’Oloron serait probablement abandonné, à cause d’un coût de
construction beaucoup trop élevé.
Le coût de construction réévalué et annoncé à 110 millions d’euros, correspond
exactement à celui que nous annoncions depuis des années, mais que le
Département 64, la Région Nouvelle-Aquitaine et les services de l’État avaient
toujours balayé d’un revers de main, tout en restant eux-mêmes, parfaitement
incapables de donner le moindre chiffre.
Les associations et collectifs citoyens doivent être des acteurs et contributeurs
majeurs des projets de territoire. Leurs expertises doivent être reconnues et leurs
avis pris en compte. Ici, on aurait gagné du temps et affiché plus de sérieux.
C’est une victoire par KO économique.
Bien sûr, nous aurions préféré que ce soit la raison, la défense de l’environnement et la protection de la santé publique, qui l’emportent, mais puisque pour certains, il n’y a rien d’autre que l’argent qui compte, et bien nous nous satisferons de cette raison. L’essentiel étant que ce projet d’un autre siècle ne voit jamais le jour.
C’est une victoire par KO économique et la démonstration incontestable de nos compétences sur la question financière, mais notre association a aussi œuvré, ces
dernières années, sur des volets tout aussi cruciaux et dans lesquels nous avons
également obtenu d’importants succès.
1. L’action en justice
En 2020, nous avons déposé une plainte, suite à une opération d’aménagement
foncier liée au projet de la déviation d’Oloron. Des travaux d’arrachage de massifs
boisés, des dégradations des cours d’eau dans des zones et à des périodes non
autorisées par la loi, avaient conduit à la destruction d’espèces et d’écosystèmes
rares, fragiles et précieux du Haut-Béarn.
Une équipe de PHBE a monté le dossier technique, recueilli les éléments et
documenté les agents de l’Office Français de la Biodiversité qui ont mené l’enquête.
Une autre équipe, avec notre avocat, a élaboré et mené, jusqu’à la victoire, notre
stratégie d’action en justice.
L’entreprise qui a effectué les travaux et avait refusé de s les interrompre malgré nos alertes préalables, a été poursuivie et condamnée au pénal. Elle a fait appel et la cour d’appel a confirmé la condamnation pour deux des trois chefs d’accusation.
C’est une immense victoire pour l’avenir du Haut-Béarn. Pour la première fois sur ce
territoire, une condamnation pénale a été prononcée pour non-respect du droit de
l’environnement. Pour la première fois aussi, un tribunal a acté que la destruction de
l’environnement et le non-respect de la loi ne devaient plus être une affaire rentable. Cela crée un précédent qui pèsera incontestablement en faveur de toutes les actions en justice qui seront engagées à l’avenir.
2. Le lobbying et l’action politique
La décision de financer et de construire, ou pas, la déviation d’Oloron devait être
prise par le monde politique. Gouvernement, Conseil Départemental, Conseil
Régional (grâce à des financements croisés) et Communauté de Communes.
Notre travail a consisté à trouver des relais parmi les élu·es et partis politiques, pour
porter nos arguments et nos demandes au sein des institutions et des collectivités
dans lesquelles se prennent ces décisions, mais dans lesquelles nous ne siégeons
pas.
Nous avons régulièrement alerté les élu·es locaux, et notamment les maires de la
vallée d’Aspe sur le chantage à la déviation qu’ils subissaient injustement. Nous
avons, entre autres, écrit au président du département 64 pour demander un
moratoire sur le projet de la déviation d’Oloron, organisé des réunions d’information
et de sensibilisation des élus locaux, et rencontré le président de la Région Nouvelle-
Aquitaine.
Nous avons également rencontré la sous-préfète d’Oloron, qui avait annoncé que les travaux ne seraient jamais autorisés tant que le financement du projet ne serait pas bouclé, pour lui démontrer que le compte n’y était pas, et n’y serait jamais.
Enfin, Nous avons adressé un courrier au Ministre des Transports, en novembre
2023, pour pointer une nouvelle fois les incohérences du projet, son coût pharaonique et demander à l’État de retirer sa participation financière. Ce courrier
était cosigné par la présidente de la commission transport du Parlement européen et une dizaine d’élu·es écologistes.
Les éléments et les chiffres repris quelques semaines plus tard par la préfecture pour justifier le retrait probable du financement de l’État sont exactement ceux avancés dans notre courrier. Nous n’avons aucun moyen de savoir si c’est ce courrier qui a convaincu le ministre, mais nous savons au moins avec certitude que nos analyses et nos conclusions vont dans le même sens.
3. Le financement de notre action en justice
Pour garantir son indépendance et conserver sa liberté d’action et de parole, PHBE
n’a jamais sollicité de subventions auprès des collectivités locales. Le financement
de nos actions en justice, plusieurs milliers d’euros par an, repose sur le montant des adhésions, les dons et surtout l’action militante.
Ainsi, nos membres et sympathisants ont organisé pendant des mois la fabrication et la vente de savons artisanaux, ainsi que deux événements majeurs (Noël au Balcon et le Vide Grenier) qui ont non seulement permis de récolter les fonds dont nous avions besoin mais ont aussi rencontré un très grand succès populaire et se sont avéré être des lieux de rencontre et de lien très puissants.
4. La bataille de l’opinion
À l’origine, les lobbies et promoteurs politiques du projet ont fait à notre association
un procès en angélisme, en amateurisme et en incompétence. Renvoyant les
défenseurs de l’environnement à une bande d’hurluberlus et « d’oiseaux de
mauvaise augure ».
Mais les actions que nous avons menées sur le terrain, comme celles des
comptages des camions, la qualité de notre communication et le sérieux de nos
dossiers ont conduit tour à tour, les tribunaux, les services de l’État, et même le
cabinet du ministre des Transports, à nous donner raison. Dans le temps, cela se voit et se comprend.
Dès lors, nos arguments sur la catastrophe environnementale, les menaces pour la
sécurité, l’économie locale et la santé publique ont commencé à être entendus,
compris et partagés par la population et l’opinion publique.
Certes, nos dossiers sont extrêmement solides et toujours justes, mais nos victoires
reposent aussi largement sur l’incompétence dramatique et l’incapacité des
promoteurs du projet à le monter et à le chiffrer sérieusement. Dans le temps, cela se voit et se comprend aussi.
5. La communication
La maîtrise du récit et la bataille médiatique représentent des enjeux déterminants
dans l’action militante. Le travail que nous avons effectué dans la presse, sur les
réseaux sociaux, dans divers événements et le professionnalisme avec lequel nous
avons choisi de gérer notre communication, ont largement participé à réhabiliter
l’image de nos combats, de nos actions et à ne pas laisser le champ libre à la
communication grossière des lobbies.
Et maintenant ?
Tout d’abord, le retrait du financement de l’État est seulement « très probable ». Il
n’est pas encore officiellement acté. Et même si on ne voit pas comment un tel projet pourrait être financé, nous allons rester vigilants et maintenir la pression pour que cette décision soit définitivement entérinée.
Nous allons également continuer à solliciter le département 64, jusqu’à ce qu’il
prenne définitivement acte de la décision de l’État et entérine à son tour son
incapacité à porter le financement du projet.
Bien sûr, tous nos autres combats continuent, mais cette lettre d’information est déjà bien longue, nous vous en parlerons dans un point ultérieur.
Chers ami·es, merci à vous, merci infiniment pour votre soutien. La lutte continue !
Adishats,
Julien Brunel, Président PHBE.
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